33.

On sonnait à la porte. Will posa son quotidien du matin, mit le nez à la fenêtre. Une Rolls-Royce bleu acier avait pris possession de l’allée. Il entendit la bonne accueillir le visiteur, puis un bruit de pas vers le séjour.

— Monsieur Shepherd, M. Lawrence pour vous.

L’homme aux cheveux blond-roux qui souriait dans l’encadrement de la porte pouvait avoir dix ans de plus que Will.

C’était à lui, Winifred Lawrence, généralement surnommé Winnie, que l’on devait le spectaculaire développement du football européen aux États-Unis. Avocat de son état, parfois imprésario mais surtout magouilleur de première, Lawrence avait la ferme intention de faire découvrir à un pays saturé de football américain, où tout n’était que violence et confusion, la grâce et la beauté d’un sport nettement plus raffiné.

Will attendit que son visiteur eût pénétré dans la pièce pour s’extraire lentement de son fauteuil, comme s’il s’y était assoupi quelques instants, et serrer la main de l’Américain.

Comme beaucoup de ses compatriotes, Lawrence n’aimait ni les préambules, ni les tergiversations. D’emblée, il interrogea Will avec un grand sourire plaqué sur son visage tel un accessoire de théâtre.

— Dites-moi, Will. À votre avis, pourquoi les Allemands sont-ils aussi dangereux en Coupe du monde ? Quelle que soit sa composition, leur équipe est toujours redoutable.

Cette question, Will se l’était souvent posée.

— Parce qu’ils sont disciplinés, j’imagine. Leur réussite repose davantage sur le jeu collectif que sur les talents individuels.

Lawrence rayonnait car, à l’instar de tant d’Américains, il se délectait d’évidences.

— Ce style, je l’ai inculqué à l’équipe américaine, mais il nous faut malgré tout des joueurs de rang mondial. Il nous manque un attaquant de génie, un vrai buteur.

— Je me doutais bien que vous n’étiez pas venu me voir pour parler broderie.

— C’est vrai, je suis là pour vous convaincre de jouer dans l’équipe nationale américaine. Et je ne repartirai pas d’ici sans avoir eu gain de cause.

Will accueillit cette menace en riant.

— Je vous souhaite du courage, parce que je vois mal comment l’Amérique pourrait être dans la course, avec ou sans moi. Me payer des mois d’entraînement juste pour avoir l’honneur de participer aux éliminatoires, non merci. À moins que quelque chose ne m’ait échappé ?

Lawrence plongea la main dans une mallette bourrée jusqu’à la gueule et en extirpa un listing qu’il déplia sur la table. Ils se penchèrent sur le document.

— Regardez, Will. Je vous demande d’oublier vos préjugés quelques instants. Regardez bien : Concacaf Zone Norte, Zone Centro et Zone del Caribe. C’est le calendrier officiel des matches éliminatoires de l’équipe américaine dans le groupe nord.

— Et alors ?

— Vous ne voyez pas ? Je vais vous éclairer. Les États-Unis ne rencontreront aucun adversaire sérieux avant la phase finale qui réunira vingt-quatre équipes.

Will se régalait. Winifred Lawrence était un bonimenteur hors pair, mais là, il racontait vraiment n’importe quoi.

— Je ne sais pas si vous êtes au courant, monsieur Lawrence ou Winnie si vous préférez, mais l’équipe des États-Unis n’est pas, elle non plus, considérée comme un adversaire sérieux. Je ne connais pas un pays qui ne serait pas ravi d’affronter les Américains ; sur le papier, c’est une vraie promenade de santé.

Lawrence prit Will par l’épaule. « C’est un bon commercial, songea le footballeur. Un pro du racolage, dans la grande tradition américaine. Plutôt sympa. »

— Justement, ça joue en notre faveur ! Nous aurons l’avantage de la surprise. Et si je vous disais que Wolf Obermeier a accepté le poste d’entraîneur de l’équipe nationale ?

D’origine allemande, ancien entraîneur de différentes équipes de championnat dans son pays natal ainsi qu’en Argentine, Obermeier passait pour l’un des esprits les plus brillants – et l’une des langues les plus perfides – de la planète foot.

— Je serais assez impressionné, admit Will. Maintenant, vous avez déjà réussi à capter mon attention. Allez-y, monsieur Lawrence, continuez. J’ai peut-être besoin de relever un nouveau défi, après tout…

— Ou de connaître les joies d’un sacre mondial…, ajouta l’Américain, tout sourires.

LA DIABOLIQUEpourepub
titlepage.xhtml
LA DIABOLIQUEpourepub_split_000.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_001.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_002.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_003.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_004.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_005.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_006.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_007.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_008.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_009.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_010.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_011.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_012.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_013.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_014.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_015.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_016.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_017.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_018.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_019.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_020.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_021.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_022.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_023.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_024.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_025.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_026.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_027.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_028.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_029.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_030.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_031.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_032.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_033.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_034.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_035.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_036.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_037.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_038.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_039.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_040.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_041.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_042.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_043.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_044.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_045.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_046.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_047.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_048.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_049.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_050.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_051.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_052.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_053.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_054.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_055.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_056.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_057.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_058.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_059.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_060.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_061.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_062.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_063.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_064.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_065.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_066.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_067.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_068.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_069.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_070.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_071.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_072.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_073.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_074.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_075.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_076.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_077.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_078.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_079.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_080.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_081.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_082.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_083.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_084.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_085.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_086.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_087.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_088.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_089.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_090.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_091.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_092.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_093.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_094.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_095.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_096.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_097.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_098.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_099.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_100.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_101.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_102.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_103.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_104.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_105.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_106.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_107.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_108.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_109.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_110.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_111.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_112.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_113.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_114.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_115.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_116.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_117.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_118.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_119.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_120.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_121.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_122.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_123.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_124.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_125.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_126.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_127.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_128.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_129.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_130.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_131.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_132.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_133.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_134.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_135.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_136.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_137.htm
LA DIABOLIQUEpourepub_split_138.htm